En 2021, la région Pays-de-la-Loire a lancé un appel à projet afin de structurer la filière du réemploi sur le territoire. Dans ce cadre, Nantes Métropole Entreprises a rencontré Mahfoud Tahlaiti, enseignant-chercheur à l’Icam et responsable des activités Génie civil & BTP, qui porte en partenariat avec la métropole un projet de filière 3R — Réemploi, Recyclage, Réutilisation, avec la création d’une plateforme de réemploi des matériaux de construction.
Transformer une contrainte en ressource
Le point de départ est sans appel : 1,2 million de tonnes de déchets issus du secteur du bâtiment sont générés chaque année sur la région Pays de Loire dont la majorité est encore enfouie. “Avant même d’imaginer une plateforme, il a fallu comprendre ce qu’on avait sous les pieds”, raconte Mahfoud Tahlaiti. “Nous avons identifié les gisements, évalué leur potentiel de réemploi, développé des protocoles techniques et posé les bases d’un modèle économique. C’est à ce moment-là que l’idée d’une plateforme s’est imposée comme une évidence.”
Pensée comme un outil industriel au service d’une écologie pragmatique, la future plateforme sera structurée autour d’une gouvernance partagée entre acteurs publics et privés. Son fonctionnement reposera sur trois axes principaux : le réemploi, le recyclage et le traitement des refus (alternative à l’enfouissement). Concrètement, à la fin d’un chantier, les matériaux seront acheminés vers la plateforme pour être triés et évalués. Ceux qui sont réemployables intégreront une chaîne de reconditionnement et seront remis sur le marché. Les autres seront orientés vers le recyclage, avec une ambition forte : réduire drastiquement l’enfouissement des déchets.
Créer un hub d’excellence pour le réemploi, le recyclage et la valorisation des ressources
La plateforme aura également pour but de mettre en avant d’autres actions transversales. Tout d’abord, la constitution d’une Chaire Recherche aux côtés d’acteurs académiques et de chercheurs afin de développer de nouveaux outils et moyens industriels pour évaluer, reconditionner et mettre en vente les matériaux. De plus, le développement de formations à destination des ouvriers et des étudiants, avec un rôle important accordé à l’ESS, moyennant la création de postes polyvalents formés selon le processus d’acquis de compétence.
“L’objectif serait de regrouper toutes ces personnes autour d’une seule et même plateforme, afin de créer un hub d’excellence pour le réemploi, le recyclage et la valorisation des ressources”, affirme Mahfoud Tahlaiti. Avec 30 flux de matériaux identifiés (isolants, parquets, carreaux…) et classés par rapport à leur potentiel de réemploi, le chercheur souligne l’importance de la polyvalence de ces nouveaux métiers afin de s’adapter aux différents flux et d’assurer un suivi efficace. Pour la première année d’ouverture, 3 à 5 flux seront pris en charge avant d’évoluer d’année en année. « Ce croisement entre recherche, industrie et inclusion fait de la plateforme un démonstrateur exemplaire de transition circulaire et juste, unique en France. »
L’ambition de réemployer et recycler jusqu’à 100 000 tonnes de déchets en 5 ans
Après avoir conduit ce travail d’identification et d’évaluation, c’est le territoire de Nantes Métropole qui a été sélectionné pour accueillir ce projet. “Lorsqu’on a fait l’étude de gisement, on a constaté que le plus fort volume de déchets était situé sur Nantes. La ville, qui a une position centrale dans la Région Pays-de-la-Loire, possède toutes les compétences pour accueillir ce type de projet. S’ajoute à cela un fort soutien de la collectivité avec notamment la dynamique Nantes, terre de réemploi Nouvelle fenêtre. Développer cette plateforme sur le territoire est donc un choix naturel et rationnel”, confirme Mahfoud Tahlaiti. Aujourd’hui, le projet entre dans une phase de recherche foncière, avec plusieurs options à l’étude.
“Nous menons actuellement une analyse comparative des différentes opportunités d’implantation, en prenant en compte des critères tels que l’accessibilité, la logistique ou encore la proximité avec les flux”. A l’échelle actuelle, seulement 1000 tonnes de déchets sont réemployées sur toute la région chaque année. Ce projet de plateforme permettra alors de passer à l’échelle industrielle, en développant des méthodes d’industrialisation du réemploi. “C’est une opportunité pour réindustrialiser la métropole. Nous espérons dans la première année pouvoir réemployer et recycler jusqu’à 10 000 tonnes de déchets, et 100 000 tonnes en 5 ans”, soutient Mahfoud Tahlaiti. Une ambition qui se concrétisera, il l’espère, dans les prochaines années.
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Découvrez l'interview de Mahfoud Tahlaiti pour en savoir plus sur son projet de plateforme de réemploi des matériaux de construction.